samedi 23 mars 2013

au coeur de nos sions infirmiérs















au cœur de nos soins infirmiers :

la personne













Brigitte boivin
Responsable clinico-administrative des soins infirmiers
Institut de réadaptation en déficience physique de Québec
525, boulevard Wilfrid-Hamel
Québec (Québec), Canada
G1M 2S8
Téléphone : (418) 529-9141 (#6903)
Télécopieur : (418) 529-7318
Courriel : brigitte.boivin@irdpq.qc.ca
au cœur de nos soins infirmiers de réadaptation : la personne


Noter que dans le texte le terme personne inclut la famille

Le contexte :

La mission de l’Institut de réadaptation en déficience physique de Québec, désigné institut universitaire depuis 1995, est d’offrir des services d’adaptation, de réadaptation, de soutien à l’intégration sociale à la personne (tout âge) qui vit des situations de handicap en raison d’une déficience auditive, motrice, visuelle ou d’un trouble de la parole et du langage, de même que des services d’accompagnement à l’entourage et à la collectivité.  Son offre de services intègre différents volets : clinique, formation, enseignement et recherche.  L’orientation client, l’interdisciplinarité et la participation sociale sont au cœur de ses interventions.  Des valeurs fondamentales, telles la primauté de la personne, la reconnaissance de celle-ci  comme principal agent de sa réadaptation, la reconnaissance du rôle de la famille, la confidentialité, le respect, la dignité, l’accessibilité et d’autres encore balisent l’offre de services.  La reconnaissance de la compétence, le soutien et l’encouragement au développement personnel et professionnel des ressources humaines sont également au cœur des valeurs organisationnelles.

Différentes approches (interdisciplinaire, écologique, biomédicale, …)  balisent nos interventions en soins infirmiers de réadaptation selon une combinaison de deux modèles conceptuels, soit le Caring et le Processus de production de handicap.  Ces interventions ont comme intention de s’intéresser au devenir de la personne, de l’accompagner dans le développement de ses compétences pour qu’elle chemine vers une qualité de vie optimale et ont comme ambition de :
§           « Compenser les incapacités résiduelles de la personne;
§           Développer les aptitudes de la personne essentielles à la réalisation de ses habitudes de vie;
§           Réduire les obstacles physiques et sociaux susceptibles de limiter la réalisation des habitudes vie. »[1]
Il importe de préciser que le choix de notre modèle conceptuel en soins infirmiers s’est fait suite au regard sur notre pratique à l’Institut.  Les concepts-clés (soin, personne, santé et environnement) sont, de ce fait, collés à notre réalité propre et en lien étroit avec le processus de production de handicap.
 
Une équipe composée de divers professionnels incluant le personnel des soins infirmiers gravite autour de la personne.  L’approche interdisciplinaire trouve son sens dans une démarche reposant sur les habitudes de vie de la personne et sa participation sociale.  Les soins infirmiers de réadaptation sont orientés selon cette même démarche.

Fondement des soins infirmiers de réadaptation :

En lien avec la mission, les valeurs, les orientations de l’Institut, les soins infirmiers comportent plusieurs dimensions :

Clinique :

L’aspect clinique se subdivise en plusieurs dimensions : les soins de base (activités de la vie quotidienne), les soins techniques (signes vitaux, pansements, cathétérisme, médication, etc.), les soins spécialisés (transferts, prévention et traitement des lésions de pression, etc.) et ultra spécialisés (dysphagie, rééducation vésicale et intestinale, etc.) avec comme but ultime l’atteinte d’une autonomie fonctionnelle maximale chez la personne.  À ces soins s’associe la relation avec une personne, pour la plupart du temps en processus de deuil avec lequel il faudra composer.  Comme le but visé de la réadaptation se veut l’intégration sociale de la personne avec une participation active dans sa communauté, les soins infirmiers de réadaptation s’organisent autour de cette dernière, en fonction de ses habitudes de vie.  Ces dernières sont influencées par les capacités de la personne.  L’organisation du travail en soins tient compte des attentes et des besoins de la personne et fait en sorte que les soins personnels, les moyens compensatoires utilisés pour pallier à la déficience et/ou le développement de nouvelles habitudes de vie deviennent pour elle, sa façon de vivre la plus acceptable et la plus correspondante possible à ce qu’elle considère comme étant une bonne qualité de vie. L’organisation des soins de réadaptation, vue sous cet angle, doit être souple, ouverte aux changements et s’adapter aux besoins de chaque individu.

Revenant à l’autonomie dans les soins de santé, il importe de mentionner que la personne, dans un contexte de réadaptation, passera de l’incapacité à faire la plupart de ses soins à la capacité, sans ou avec diverses adaptations, selon son potentiel de réadaptation.  Ce développement de compétences à la prise en charge de la personne par elle-même dans l’accomplissement de ses soins exige du personnel soignant qu’il travaille selon une approche d’évaluation, de prévention, d’enseignement, de supervision, de support, d’encouragement et d’accompagnement à la personne qui apprend.   La capacité et le rythme d’apprentissage de la personne, de même que son cheminement dans le processus de deuil seront des déterminants importants à considérer au niveau des soins.  La relation infirmière / personne s’établit sur la reconnaissance des capacités de cette dernière à prendre soin d’elle-même et sur le support nécessaire au développement maximal de son potentiel.   Le personnel infirmier favorisera la poursuite de l’intégration sociale de la personne par la valorisation de cette dernière et par l’encouragement soutenu dans ses apprentissages.  Comme les expérimentations dans le milieu de vie contribuent considérablement à la réadaptation, il est alors important, pour la personne admise, d’encourager rapidement des sorties dans son milieu afin de préserver son réseau social et de connaître les facteurs de réussite et les obstacles à l’intégration.  
La participation au plan d’intervention interdisciplinaire (PII) de la personne est essentielle et le personnel infirmier se doit d’offrir les soins correspondant aux besoins identifiés par celle-ci lors de ces rencontres.  Une bonne préparation, de même qu’un suivi au PII sont nécessaires pour assurer une continuité des soins qui rencontre les besoins de la personne.  En considérant le rôle clinique (évaluation, intervention, suivi, prévention, éducation à la santé, enseignement, accompagnement, supervision, coordination, liaison, advocacy, exécutante de prescriptions médicales) de l’infirmière en réadaptation, sa participation au PII est incontournable. 

Le développement d’outils de soins et d’outils de communication basé sur le modèle de caring combiné au processus de production de handicap assure une cohérence entre la mission, les orientations, les actions des gestionnaires et des intervenants pour le mieux-être de la personne.  L’amélioration continue de la qualité et de la sécurité des soins infirmiers de réadaptation s’inscrit comme un objectif permanent et évolutif dans l’offre de service.

Enseignement :

Étant Institut universitaire, les infirmières des différents programmes ont à recevoir des étudiantes en soins infirmiers; ce qui nécessite d’être à jour au niveau des connaissances, d’investir du temps pour l’enseignement, d’établir les liens entre la personne soignée et l’étudiante.  À ce propos, il est important de mentionner que la durée prolongée du séjour des personnes fait en sorte que certaines trouvent parfois difficile de recevoir des soins et services de plusieurs étudiantes, compte tenu des nombreuses disciplines qui gravitent autour d’une même personne.  Les infirmières sont donc appelées à préparer les personnes pour assurer le maintien d’un climat de confiance, d’autant plus qu’en soins infirmiers, plusieurs interventions touchent des habitudes de vie faisant référence à l’intimité.

Formation :

À ce niveau, la contribution du personnel infirmier s’inscrit dans sa capacité à se maintenir à la fine pointe du développement de la discipline, à développer son expertise en soins infirmiers de réadaptation et à transmettre son savoir à ses partenaires internes et externes.  Dans ces optiques, différents aspects sont à considérer, dont voici quelques exemples :
·         L’accueil, l’orientation, l’intégration et la rétention des nouveaux employés
·         Le transfert d’expertise à des pairs internes ou externes
·         Le développement des soins par rapport aux besoins spécifiques de la clientèle (urologie, rééducation intestinale, SEP, soins d’urgence, etc.)
·         La participation à de la formation continue, à des formations plus ciblées  favorisant une mise à jour continue, un maintien et/ou développement des compétences dans le domaine.
·         Autres

L’accès à la formation et la possibilité de transmettre des connaissances demeurent des dimensions préoccupantes, en raison du peu de disponibilité des infirmières (remplacement difficile, surcharge pour les pairs, etc.). 
Compte tenu également des clientèles spécifiques à chaque programme, une infirmière d’expérience dans un programme peut s’avérer quasi débutante dans un autre programme.  Le transfert des connaissances et de l’expertise est de ce fait, une préoccupation à tenir compte pour le personnel appelé à changer de programme.  Il importe aussi de s’assurer que le personnel occasionnel ait accès aux formations et au support nécessaire pour une assurance de qualité et sécurité des soins. 

Recherche :

Dans un Institut universitaire, la recherche fait partie intégrante du travail ou du moins, certains intervenants contribuent au développement de la profession en visant toujours l’amélioration continue des soins et la mobilisation du personnel dans leur apport aux interventions interdisciplinaires et à la clientèle.  Les soins infirmiers en réadaptation physique, doivent être complets, actuels, en continuité avec les autres professionnels, les autres établissements, mais surtout ils doivent répondre aux attentes et aux besoins de la clientèle.

Encore aujourd’hui, les infirmières fondent bien peu leur pratique sur des résultats de recherches scientifiques.  Il est souhaitable d’établir un partenariat avec les milieux universitaires pour favoriser la recherche en soins infirmiers de réadaptation. 

Pour ce faire, il est essentiel que le personnel infirmier adhère à une philosophie où le changement est omniprésent en raison de l’évolution de la clientèle, de la discipline et de la mission de l’organisation.  La participation à des comités ou groupes de travail, à des rencontres entre pairs à l’interne et à l’externe sont des sources d’intérêt pour la recherche.  Il importe de favoriser la recherche en soins infirmiers de réadaptation, de reconnaître l’expertise et l’apport au développement de la pratique infirmière en réadaptation. 

Des conditions facilitant le travail en soins infirmiers : la gestion

Le personnel infirmier dans le contexte actuel des soins (arrivée précoce des personnes nécessitant des soins techniques importants, prévention des infections accrue, manque de ressources, instabilité des équipes, etc.) doit être vigilant pour garder à l’esprit la dimension spécifique de la réadaptation.  L’employeur doit, à son tour, voir à ce que les conditions et l’organisation du travail du personnel infirmier permettent une offre de services correspondant aux soins de réadaptation.  «L’environnement dans lequel se situe l’action des gestionnaires pose de nombreux défis.  Pensons à la conciliation de situations qui peuvent paraître paradoxales : la survie financière de l’établissement et les valeurs humaines des soins infirmiers, la continuité des soins et l’instabilité des équipes de travail, l’autorité hiérarchique et l’autonomie du personnel soignant, les luttes de pouvoir et la collaboration intra et interprofessionnelle, la standardisation et le respect de la diversité, la bureaucratie et la participation, l’impersonnalité des structures et l’engagement à l’égard de la personne, enfin la technologie et les valeurs humaines.»[2]  Enfin, il est souhaitable qu’il y ait cohérence entre les valeurs, la philosophie et la vision des gestionnaires et des personnes soignantes.  L’approche par programme, la gestion par quart de travail, le système de prestation de soins, ne sont pas sans poser certaines difficultés.  La communication prend alors tout son sens pour assurer une cohérence dans la gestion des soins infirmiers.



Pour terminer cet aperçu bien sommaire des soins infirmiers de réadaptation à l’Institut de réadaptation en déficience physique de Québec, il est essentiel de mentionner que la démarche de soins s’inscrit dans un contexte d’interdisciplinarité où la personne/famille se retrouve au centre en tant que décideur des soins à recevoir.  Dans une optique psychosociale visant l’intégration et la participation sociale de la personne dans sa communauté, les habitudes de vie de la personne et sa qualité de vie telle qu’elle la définit, sont les déterminants centraux de l’organisation de soins. 



Brigitte Boivin
Le 3 juillet 2006



            LA DOULEUR CHEZ LA PERSONNE آGةE
Par le Docteur Bruno COMYN
 
2 remarques pour commencer
- La prévalence de la douleur augmente avec l'âge.
- Il s'agit d'une urgence en gériatrie car elle entraîne : anorexie, dénutrition, troubles du sommeil, dépression, perte d'autonomie, syndrome de glissement (risque suicidaire important chez la personne âgée) chez le patient, et retentit sur l'entourage.
DةFINITIONS
On distingue trois niveaux dans la douleur :
1) Définition de la douleur : Elles sont nombreuses. La plus satisfaisante est celle de l'association internationale de l'étude de la douleur
proposée en 1979 : " la douleur est une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable, liée à une lésion tissulaire existante ou potentielle ou décrite en terme d'une telle lésion".
La douleur comprend quatre composantes : sensorielle, émotionnelle, cognitive et comportementale.
2) Définition de la souffrance : Les réactions engendrées par la douleur correspondent à la notion de souffrance. C'est l'association de phénomènes à la fois physiques, moraux et psychologiques mettant en jeu tous les mécanismes affectifs, intellectuels et instinctifs. La souffrance varie beaucoup d'un individu à l'autre, elle est fonction du contexte ou de la signification de la douleur. Ainsi les douleurs de cicatrisation post-opératoire sont moins pénibles que celles qui accompagnent la réapparition d'un cancer.
3) La douleur totale : Cecily Saunders a qualifié de "total pain" les multiples composantes de la douleur chronique : physiques, psychologiques, spirituelles et sociales. La douleur chronique est en elle-même une maladie pour certains. La prévision de sa continuité conduit à l'anxiété, à la dépression et à l'insomnie qui, en retour, accentuent les composantes physiques de la douleur.
ةVALUATION DE LA DOULEUR
- Avant tout, il convient de connaître l'histoire de la maladie l'histoire du malade, ses antécédents, son psychisme antérieur
- Différencier douleur aiguë et chronique.
- Préciser les caractères de la douleur : type, intensité, siège, irradiation, conditions de survenue, variations (selon geste, position, médicaments, visite, occupation...), ancienneté...
- Le malade est l'expert pour évaluer sa douleur.
Deux notions capitales :
- c'est le malade qui évalue sa douleur (dans toute la mesure du possible). En cas de difficultés ou d'impossibilité, l'évaluation sera menée par les soignants. Dans tous les cas, elle s'efforcera d'être pluridisciplinaire.
- le malade a toujours raison quand il évalue sa douleur (même si son évaluation ne correspond pas à celle que feraient les soignants, en plus ou en moins).
L'interrogatoire de la famille est également indispensable.
L'évaluation est toujours triple: par le patient (+++), par les soignants, par la famille; avec mise en commun ensuite.
Les échelles :
Elles ne représentent pas une fin en soi, mais constituent un bon instrument de communication.
Elles sont de plusieurs types :
a) Unidimensionnelle : la plus connue est l'E.V.A.(échelle visuelle analogique) simple et rapide à mettre en oeuvre, mais pas toujours utilisable car nécessite une capacité d'abstraction et de compréhension.
b) Pluridimensionnelle : la "Mac Gill pain questionnaire", et le questionnaire de la douleur de Saint Antoine (QDSA). Longue, nécessite une bonne verbalisation, n'analyse pas le comportement.
c) Comportementales : basées sur l'étude du comportement du malade, elles sont essentiellement au nombre de trois
1- échelle E.G.R.( échelle de Gustave Roussy), qui est en fait une échelle de la douleur chez l'enfant.
2- échelle Doloplus de Bernard Wary qui, à notre sens, est la meilleure et la plus adaptée à la gériatrie bien qu'elle ne soit pas exempte de critiques. Elle permet l'étude du retentissement somatique, du retentissement psychomoteur et du retentissement psycho social de la douleur.
3- grille d'évaluation de la douleur de l'U.S.P. du Val d'Azergue.
Les particularités de l'évaluation de la douleur chez la personne âgée sont de deux ordres :
- liées à l'interrogatoire : qui est souvent contraire, émaillé de nombreuses plaintes,
- liées à l'examen clinique : permettant le recueil de manifestations verbales (audibles) et non verbales (visibles) particulièrement intéressantes chez le sujet âgé non communiquant.( il faut savoir qu'aucune de ces échelles n'est parfaite et qu'elles sont toutes critiquables).
Les difficultés :
- L'évaluation doit être tripartite: patient, soignants, famille.
- Le recueil de l'évaluation de la douleur faite par le patient doit obligatoirement être multidisciplinaire c'est-à-dire incluant l'appréciation de l'aide-soignante, de l'infirmière et du médecin car la fonction de l'évaluateur est très importante : que dit-on à qui ? qui évalue ?
- Il convient d'évaluer et de réévaluer régulièrement (avant et après la prise de médicaments, une visite, une occupation...).Mais à l'acmé de la douleur, le patient ne supporte pas toujours bien d'être "questionné".
-
ةvaluer les différentes douleurs (et non la douleur), qui peuvent peut-être nécessiter plusieurs traitements (et non un traitement).
-
ةvaluer une douleur revient à "confronter" deux subjectivités: celle du patient, et celle de l'évalueur. Celui-ci doit être le plus neutre possible dans son appréciation.
- Le seuil de la douleur est très variable dans le temps.
- L'évaluation peut être rendue difficile : soit chez un patient volubile, plus ou moins hypochondriaque, soit au contraire chez un patient dont les réponses sont pas ou peu fiables du fait :
- d'un trouble de l'attention,
- d'un état confusionnel, d'une dépression,
- d'une altération de la mémoire,
- d'une atteinte sensorielle ou du langage,
- de troubles neuropsychiques,
- d'une atténuation de la douleur d'ordre culturel,
- d'un masquage d'une plainte aiguë dans un cortège de plaintes chroniques fluctuantes, (d'où l'importance de l'examen clinique, encore plus fondamental chez la personne âgée),
- de la multiplicité des atteintes pathologiques avec donc la multiplicité de douleurs différentes, parfois de nature ou d'origine distincte.
- Noter l'évaluation par écrit, avec précision (et non : "il a mal, il a plus mal ou moins mal", ce qui est inexploitable par le médecin)
- Ne pas se priver du test thérapeutique antalgique si on hésite sur la réalité de la douleur: il peut "rapporter gros" pour le patient.
Quels mots sur quels maux ? Principe de base : le patient a toujours raison quand il parle de sa douleur; et il est important de lui signifier que nous croyons qu'il a mal, nous croyons à sa douleur, et nous l'avons prise en compte; même si certains patients ont tendance à minimiser ou au contraire maximaliser leur douleur. Il convient alors de comprendre le pourquoi de cette attitude. ( Il est capital que les soignants, mais aussi la famille, puissent confronter ce que le patient a pu leur exprimer, verbalement ou non (attitudes du corps, sous-entendus...). En effet on n'exprime pas les mêmes émotions, les mêmes sensations, au conjoint, au médecin, et à l'aide soignante par exemple. Les "conséquences" ne sont pas les mêmes, les éventuels "intérêts" non plus. Une non mise en commun des différents messages envoyés à ces différents "récepteurs" expose à un risque important de perte de qualité et d'intensité de ceux-ci. Exprimer sa douleur au médecin peut entraîner une nouvelle hospitalisation, de nouveaux traitements (chimiothérapie par exemple, souvent redoutée ou mal vécue), de nouveaux examens (parfois eux mêmes douloureux) ; un dialogue risque de reprendre avec parfois son cortège de mots difficiles à entendre, de décisions à prendre, de réflexions et de "remue-méninges". Les défenses érigées à grand peine risquent d'être malmenées. Autant de perspectives que le malade craint souvent. Dès lors on peut comprendre la retenue du malade. Que va dire ou faire le médecin si je lui signifie ma douleur ? ( Exprimer sa douleur à l'infirmier(e) ou à l'aide soignant(e) n'a pas du tout la même résonance. Ce soignant n'a pas le pouvoir décisionnel (décision parfois vécue comme "sanction" par le patient du fait de ses éventuelles conséquences). De ce point de vue, se confier devient dès lors plus facile, moins "dangereux" (même si ses propos sont retransmis au médecin).D'autre part ce soignant est souvent du sexe féminin ; avec pour le patient, en filigrane , le risque d'amalgame plus ou moins conscient avec le rôle de mère. On devine alors les risques et le danger, autant pour la soignante que pour le patient. Exprimer sa douleur à la famille ou aux proches apporte son lot de difficultés : générer de la peine, de l'angoisse, de l'insomnie, de la colère, de la fuite, une mauvaise communication, être jugé...
Perception de la douleur chez la personne âgée : Elle est identique à celle de l'adulte plus jeune, tout au moins sur le plan physiologique et neuro anatomique. C'est l'expression qui est modifiée, non la perception. Attention aux pièges de la confusion, de la dépression, du repli, du mutisme, du changement de caractère, qui peuvent représenter autant de manifestations atypiques de la douleur. Il en est de même pour les cris du dément ou du psychotique où on ne distingue plus bien les cris "habituels" des cris de douleur. L'âge avançant, les dysfonctionnements et les sources de douleurs se multiplient, qu'elles soient aiguës ou chroniques. Le sujet âgé finit par banaliser ses douleurs. Il devient fataliste, comme si âge et douleur allaient forcément de pair. Dès lors, il se plaint moins. Mais il est probable que la génération future de personnes âgées se plaindra davantage que l'actuelle car moins habituée à souffrir.
De la nécessité de toujours rechercher l'étiologie, même et surtout chez le dément. L'examen clinique par le médecin est indispensable ; il doit être aussi complet que possible même s'il demande plus de temps et de patience chez la personne âgée. Il doit s'évertuer à déterminer l'étiologie et à comprendre le mécanisme de la (ou des) douleur(s) afin de pouvoir bâtir une stratégie thérapeutique adaptée, et donc plus efficace. Pas de traitement "presse bouton" automatique. Il est nécessaire de faire l'inventaire des différentes pathologies et des différents traitements.

AUTRES TRAITEMENTS NON MةDICAMENTEUX DE LA DOULEUR
La qualité de la relation avec la personne âgée et la prise en compte de la dimension psychologique de la douleur sont fondamentales, faute de quoi on s'expose entre autres au risque d'échec du traitement, aux effets secondaires et à une mauvaise observance. Il est indispensable d'instaurer une véritable politique de prise en charge de la douleur et de la dépression souvent associée si elle se pérennise (risque de cercle vicieux douleur dépression).
Préserver l'autonomie maximale et la qualité de vie doit rester une priorité absolue.
1) Versant psychologique : rappelons le rôle essentiel de soutien que peut avoir la famille près de son patient, et les soignants près de la famille.
- en théorie : soutien psychothérapeutique, relaxation, sophrologie, hypnose, balnéothérapie, musicothérapie, sociothérapie.
- en pratique gériatrique, tout dépend de la participation ou non, et de l'état neuro psycho sensoriel du patient.
2) La physiothérapie :elle a un rôle relationnel important (kinésithérapie, rééducation, stimulation électrique trans-cutanée -T.E.N.S-).
3) Traitement chirurgical : viscéral, orthopédique, ou neurologique.
4) Radiothérapie

SIGNIFICATION DE LA DOULEUR POUR LE MALADE-ةCOUTE DU MALADE
Préambule:
- le patient n'attend pas ou ne demande pas toujours "zéro douleur" quelle est sa demande ? lui rendre une douleur supportable lui suffit assez souvent.
- pourquoi certains patients ne disent pas, ou masquent leur douleur ?
- faut-il calmer toutes les douleurs ? n'y a-t-il pas des douleurs " positives" au même titre qu'il existe des stress positifs et des stress négatifs ? Question d'intensité ?
- il est nécessaire d'expliquer au patient sa douleur (causes, mécanismes, traitements...) ce qui le tranquillisera.
Signification : en voici quelques unes :
- expiation (de quoi ?), châtiment (qu'ai-je fait pour avoir si mal ? qu'a-t-il fait pour "mériter" cela ?) => parfois culpabilité.
- rédemption, grandissement spirituel (l'
ةglise ne le pense plus !) => acceptation plus facile.
- avoir mal = être vivant, donc maîtriser encore un peu (ou avoir le fantasme de) ; parfois "peur de ne pas avoir mal", car avoir mal = vivre.
- passage obligé, nécessité, fatalité => parfois lâcher prise, dépression.
- un test (selon la perception de la famille) : " il n'a pas de courage, il se laisse aller, il se plaint toujours" => risque de jugement par la famille si mauvaise tolérance par le patient.
- seul vecteur de communication entre le patient et l'équipe ou la famille => incite à revoir la qualité d'écoute et de prise en charge du patient (douleur-maternage, douleur-régression, douleur-dépendance, douleur-dépression).
- une muraille défensive d'économie psychique : la douleur physique est encore moins pénible que la douleur psychique à laquelle elle se substitue ; elle évite de penser à autre chose, de se poser les vrais questions, de sombrer dans la psychose ou la névrose.
- aggravation de l'affection causale, en particulier si la douleur s'accentue => angoisse.
- prétexte à chantage: "si je dois guérir, j'accepte la douleur ; sinon, je l'accepte mal".
ةcoute du malade : toujours nécessaire, elle devient absolument indispensable pour entendre et essayer de comprendre ce que le malade nous
signifie à travers ses mots ou... ses silences, à travers son vécu de sa douleur (attention au piège de l'interprétation, de l'écoute sélective, du "se mettre à la place de").

VةCU DE LA DOULEUR PAR LA FAMILLE ET LES SOIGNANTS
Les soignants ( Rappelons la nécessité de se former sur la douleur) :
- pour les médecins, afin d'apprendre à l'évaluer et la traiter,
- pour les infirmières et aides soignantes, afin d'apprendre à l'évaluer, la rapporter au médecin, et la gérer au lit du patient,
- pour tous les soignants, afin d'apprendre à gérer ses émotions face à la douleur de l'autre (ce qui ne veut pas dire devenir insensible), et pour comprendre son étiologie, ses mécanismes, le maniement des médicaments. ( La non prise en compte, et/ou la persistance de la douleur, parfois malgré un traitement bien conduit, induit une souffrance psychologique chez les soignants, en particulier chez les infirmières et aides soignantes. ( Sont souvent rencontrés : la culpabilité, la responsabilité, l'impuissance, l'angoisse, le mal-être, la projection, la révolte, la colère, la fuite, la sensation d'être douloureux soi-même, la frustration, l'épuisement (burn-out), les conflits dans l'équipe, l'impression de non mériter les reproches parfois adressés par la famille : Peut alors se profiler, tout au moins dans l'imaginaire, la tentation de l'euthanasie : "Je ne supporte plus de le voir souffrir". ( L'importance des prescriptions anticipées est alors bien mise en exergue, afin de ne pas laisser la douleur physique s'installer, et son corollaire la douleur psychique. ( L'utilité, et parfois même la nécessité, de respecter certaines douleurs physiques, qui viennent se substituer à des douleurs psychiques encore plus dévastatrices et plus intolérables. C'est parfois ce que fait le patient quand il minimise ou nie ses douleurs.
La famille : Il est nécessaire d'expliquer la situation pathologique à la famille, dans tous ses compartiments, et la stratégie diagnostique et
thérapeutique afin de l'éclaircir. La tension anxieuse s'en trouvera considérablement soulagée. La douleur d'un proche ou d'un ami peut générer :angoisse, agressivité, colère vis à vis des soignants, révolte, non communication, impuissance, fuite, parfois même arrêt des visites, demande d'euthanasie.

CONCLUSION
ةCOUTER - ENTENDRE - FAIRE CONFIANCE ET CROIRE LE MALADE - COMPRENDRE - EXPLIQUER LA MALADIE -
NE PAS DةLAISSER LA FAMILLE
ةVALUER ET RةةVALUER LA DOULEUR
TRAVAIL MULTIDISCIPLINAIRE D'ةQUIPE




[1] L’offre de service de l’IRDPQ, février 2006
[2] Kérouac Suzanne, Pepin Jacinthe, Ducharme Francine, Duquette André, Major Francine, La pensée infimière, Éd.Études vivantes, 1994, p.120

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire